Le débat va peut être devenir d’actualité, si nos députés et sénateurs prennent la mesure du chemin dans lequel l’Allemagne et notre gouvernement veulent nous engager.

 

Je m’étais engagée à vous remémorer les débats de 1957 quand le traité de ROME, fondateur de la zone Euro, était venu sur le devant de la scène.

 

Ce débat avait été animé d’une part par le constitutionaliste Maurice DUVERGER, dont vous avez eu le teneur de son analyse ; voici maintenant ce qu’en disait Mendès France, membre éminent du parti socialiste et référence s’il en est, par les temps qui viennent de s’achever. Et c’est là, l’ironie du hasard !

 

Nous étions à la fin de la seconde guerre mondiale et les anciens ennemis avaient alors la volonté politique de rendre impossible le retour de conflits armés en Europe, en développant la complémentarité économique de leurs pays.

 

Après être passé par la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, puis l’échec de la Communauté européenne de défense en 1954, la reprise de négociations débouchait le 25 mars 1957 sur le Traité de Rome signé par l’Allemagne, la France, les Pays du Benelux et l’Italie.

 

Dès le 18 janvier 1957, lors du débat parlementaire, Mendès France exprimait un pessimisme prémonitoire et votait contre ce traité. Alors, cet homme éminemment politique était loué pour sa lucidité et ses compétences économiques.

 

Ses inquiétudes ne portaient pas sur les déficits alors peu importants mais il redoutait que la libre circulation des personnes provoque l’entrée en France de population proposant leur travail pour un salaire inférieur à celui pratiqué par notre pays. Il pensait aux chômeurs italiens et allemands qui pourtant « n’envahiront » pas notre sol. Mais la mobilité des travailleurs restant faible, les pays à faible coût salarial ayant intégré par la suite l’Union, concurrenceront bien ceux où les salaires sont plus élevés. Il regrettait ainsi d’ailleurs que « rien ne soit fait pour la généralisation rapide des avantages sociaux à l’intérieur des tous les pays du marché commun », car « nos partenaires veulent conserver l’avantage commercial qu’ils ont sur nous du fait de leur retard en matière sociale ».Or, selon lui, si une « harmonisation » est souhaitable, « elle doit se faire dans le sens du progrès social, du relèvement parallèle des avantages sociaux et non pas… au profit des pays les plus conservateurs, et au détriment des pays les plus socialement avancés ».

Il allait plus loin et se préoccupait du risque de disparition de tarif douanier commun imposé aux marchandises entrant dans la CEE. Il pensait que « nos associés voudront un tarif le plus bas possible », ainsi, « notre industrie se trouvera alors découverte contre toutes les concurrences du dehors ». S’il pensait lors aux Etats Unis et au Japon, aujourd’hui , le problème se pose avec les produits des pays émergeants principalement la Chine, la Corée etc.. 

De même il s’inquiétait de la libre circulation des capitaux dont il prévoyait qu’elle encouragerait les investisseurs à aller vers les pays « à faibles charges », débouchant sur « un exode des capitaux français » dont il résulterait »une diminution des investissements productifs, des pertes de potentiels français et un chômage accru ».

Il déplorait alors déjà que le « fond d’investissement européen » prévu par le rapport SPAAK (préalable au traité de Rome), soit abandonné dans le texte définitif alors qu’il aurait permis de financer des opérations de reconversion industrielle nécessaires et « la construction d’une Europe économiquement intégrée ».

 

Enfin et surtout, l’ancien président du Conseil, craignait déjà que « la délégation de pouvoir à une autorité extérieure » qui « au nom de la technique, exercera en réalité la puissance politique (et dictera) une politique monétaire, budgétaire, sociale »  conduise à une « abdication » de la démocratie. « Nous ne pouvons pas nous laisser dépouiller de notre liberté de décision dans des domaines qui touchent d’aussi près notre conception même du progrès et de la justice sociale », ajoutait-il ; les suites peuvent en être trop graves du point de vue social comme du point de vue politique…Prenons-y bien garde : le mécanisme une fois mis en marche, nous ne pourrons plus l’arrêter ».

 

Ces points soulevés par cet éminent personnage de la IVème République, sont les mêmes que soulèvent ceux qui contestent non sans raison, aujourd’hui, les grandes orientations de politique économique prévalant en Europe actuellement. En effet, ni le traité de Maastricht, ni celui de Lisbonne (contre lequel au passage le peuple français souverain a voté non par référendum et par un abus de pouvoir du président Sarkosy a été validé par les parlementaires en violation de la volonté du peuple) ne prévoient ni politique industrielle coordonnée, ni mécanisme d’aide directe aux états, ni convergence sociale. Plus, les états ont validé, au fil du temps, la concurrence et le déséquilibre, fiscal, social entre les états créant même des zones de non droit dans des pays adhérents. Mr SCHRODER, socialiste allemand ayant même imposé un plan monumental de régression sociale aux salariés allemands favorisant le capitalisme industriel et financier du pays contre les intérêts des autres grands pays européens, France y compris.

 

La négociation imposée par Hollande sur les aides aux investissements, ne sont pas à la mesure des défis qui attendent l’Europe et sa re-fondation.

On ne peut pas, en France, s’appuyer sur ce présupposé accord sur la somme de 120 milliards d’euros, pour faire « passer » au parlement, sans débat public sérieux et dans la durée, les abandons de souveraineté qui nous sont imposés par l’Allemagne essentiellement, et certains pays du Nord. Le président de la République, et le parlement, dont l’un est le garant de la souveraineté nationale et l’autre le garant de la démocratie ne peuvent se dispenser d’avoir recours au peuple avant de valider ce qui doit engager notre pays comme jamais.

 

Dans la Constitution Française le droit à l’initiative populaire a été introduit. C’est le moment ou jamais de demander à nos élus de s’en saisir pour l’appliquer.