Pour l’industrie chimique.

Ce mois-ci, le « gendarme européen » de notre assiette, va rendre son rapport sur une nouvelle manière d’évaluer les risques des produits chimiques sur notre santé.

Cela fait 15 ans que les fabricants poussent à la roue pour que l’Europe adopte « le seuil de préoccupation toxicologique », nom de la nouvelle méthode que vient de passer au crible ce « gendarme » et dont il s’apprêterait à ne dire que du bien.

Une perspective qui donne des boutons à une fédération d’ONG qui milite contre l’usage immodéré des pesticides. Jusqu’ici , c’était le bon vieux principe de précaution qui prévalait : un produit reconnu cancérigène devait être retiré du marché.
Avec le nouveau principe on passe de l’évaluation du risque à la fixation d’un seuil en dessous duquel des substances chimiques n’auront pas besoin de subir de tests avant d’être commercialisées.

C’est d’autant plus fâcheux que le seuil de préoccupation toxicologique (SPT) fixerait des niveaux d’exposition toxicologique extrêmement élevés.

La nouvelle approche prend en compte de vielles études fournies par l’industrie à une époque où l’on ne regardait pas encore certaines formes de toxicité. Par exemple le système immunitaire ou endocrinien. En clair, il n’est pas certain, par exemple, que le bisphénol A des biberons en plastique aurait été interdit avec cette nouvelle norme. Pour les industriels, le SPT permettrait de décrocher plus facilement et à moindre coût des autorisations de mises sur le marché.
Cela n’a rien à voir bien sûr, mais quand on épluche la composition du groupe de travail qui planche pour ce gendarme européen depuis 2008, on voit que 10 des 13 experts ont un conflit d’intérêts avec l’industrie ou avec l’association de lobbying montée par les géants de l’agroalimentaire tels que ..Monsanto…
Pour rassurer tout le monde, le gendarme vient d’annoncer qu’il allait renforcer « ses procédures afin d’éviter les conflits d’intérêts potentiels et les cas de pantouflage ». Ouf, on a eu peur !

 

A rapprocher ce qui suit à propos des oranges

 

Aux Etats Unis, ont été découverts dans les jus d’oranges importés du Brésil par des marques telles que Tropicana, Simply Orange, un fongicide non autorisé. La corbendazime, c’est le nom de cette douceur, mutagène, reprotoxique et tératogène qui fiche le bazar dans le génome, s’attaque à la fertilité et provoque des malformation fœtales lorsque la mère est exposée.
Question est-ce que cette joyeuseté  est importée aussi en France ? Les marques concernées interrogées bottent en touche vers l’Union nationale interprofessionnelle qui répond que rien d’anormal n’a été repèré, même réponse au niveau de la Commission Européenne. Côté français on répond que la corbendazime est interdit depuis le grenelle de l’environnement de 2007…Sauf qu’à y regarder de plus près c’est un peu plus complexe.

Alors qu’aux USA la moindre trace de fongicide est bannie, l’Europe tolère la trace de résidus jusqu’à un certain seuil. Les fruits importés ont le droit d’être traités à ce produit. Mieux jusqu’en 2014, les agriculteurs européens peuvent également asperger les champs de céréales, de betteraves et de maïs, ce qu’ils ne rechignent pas de faire dans certains pays et cela parvient sur les étals français.

Cerise sur le gâteau (à l’orange) : alors que les pouvoirs publics se félicitent d’avoir interdit la corbendazime, nos agriculteurs ont le droit d’épandre dans leurs vergers du Thiphanate-méthyl, une substance active qui, une fois dans l’organisme, se transforme en devinez quoi ? Corbendazime !

Mais pas de souci, « le respect des limites maximales de résidus permet de garantir la sécurité pour le consommateur », répond Bruxelles. Autrement dit il n’y a pas de quoi en faire une salade (d’oranges)…