Voici ce que dit de cette négociation en cours, Mme Corine PELLUCHON, sur son blog « LibéRation de Philo » : Ce qui importe, devant le récit de la catastrophe sociale programmée, n’est pas d’appartenir à tel ou tel camp, mais d’empêcher une ruine sociale et morale qui fera infiniment plus de vaincus que de vainqueurs » (extrait de son article « Tafta et sa logique totalitaire »

 

 Passons à l'article 25 qui va vous éclairer sur l'aspect "totalitaire" invoqué ci-dessus, suivi de l'article 26 qui confirme en une seule phrase cet aspect "totalitaire" et qui nous concerne tous, à commencer tous nos élus quels qu'ils soient !

 
 

Questions réglementaires et barrières non tarifaires

 

25 L’Accord visera à éliminer les obstacles inutiles au commerce et à l’investissement y compris les obstacles non tarifaires existants par le biais de mécanismes efficaces et performants, en atteignant un niveau ambitieux de comptabilité de la réglementation des biens et des services, notamment par la reconnaissance mutuelle, l’harmonisation et une coopération mutuelle renforcée entre les régulateurs.
La compatibilité de la réglementation se fera sans porter atteinte au droit de réglementer en fonction du niveau de protection de la santé, de la sécurité, du travail, de l’environnement et de la diversité culturelle que chaque Partie juge approprié, ou à part cela, à la réalisation des objectifs fixés à l’article 8. A cette fin, l’Accord doit comprendre des dispositions relatives aux questions suivantes :

 

Les obstacles non-tarifaires dont il s’agit, ce sont les législations, les réglementations , les normes sociales, sanitaires, phytosanitaires, environnementales ou techniques qui sont jugées par les entreprises étrangères comme des mesures visant à protéger le marché intérieur contre la concurrence extérieure. L’objectif, c’est de les éliminer en commençant par obtenir l’alignement sur la norme la plus basse. Les normes alimentaires, sanitaires, sociales, environnementales les moins protectrices et les plus faibles pour l’essentiel aux USA.
Le deuxième paragraphe a pour but de rassurer, comme déjà indiqué au commentaire de l’article 8 auquel il fait d’ailleurs référence.
Mais ces bonnes intentions sont démentiées par ce qui suit :

 

Suite article 25 :

-         le mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS)

-         En ce qui concerne les mesures sanitaires et phytosanitaires, les négociations suivront les directives de négociations adoptées par le Conseil le 20 février 1995 (doc 4976/95). Les parties adopteront des dispositions de l’accord vétérinaire existant ; elles introduiront des disciplines en ce qui concerne la santé des végétaux et mettront en place un forum bilatéral afin d’améliorer le dialogue et la coopération sur les questions SPS. Dans les zones couvertes par l’accord vétérinaire UE-USA en vigueur, les dispositions pertinentes devraient être considérées comme le point de départ des négociations. Les dispositions du chapitre SPS s’appuieront sur les principes essentiels de l’Accord SPS de l’OMC, y compris l’exigence que les mesures  SPS de chaque côté se fondent sur la science et sur les normes internationales ou des évaluations scientifiques des risques, tout en reconnaissant le droit pour les Parties à évaluer et gérer les risques en conformité avec le niveau de protection que chaque Partie juge approprié, en particulier lorsque les preuves scientifiques sont insuffisante, mais ce droit s’appliquant seulement dans les mesures nécessaires à protéger la santé humaine, animale ou végétale, et se développant de manière transparente, sans retard injustifié. L’Accord devrait également viser à établir des mécanismes de coopération entre les Parties qui débattra notamment des règles équivalentes en matière de protection des animaux.
L’Accord devrait chercher à assurer une transparence totale en ce qui concerne les mesures sanitaires et phytosanitaires applicables au commerce, en particulier par l’établissement des dispositions relatives à la reconnaissance de l’équivalence, par la mise en œuvre d’une liste préalable des établissements producteurs des denrées alimentaires, pour empêcher la pratique de dédouanement préalable, par la reconnaissance des Parties de zones exemptes de maladies et de parasites et du principe de régionalisation pour les maladies animale et les parasites des plantes.

Les deux Parties ont des manières très différentes de protéger les consommateurs. Aux USA le gouvernement n’est pas en charge de l’intérêt général, c’est par les voies offertes de recours aux tribunaux que les consommateurs peuvent agir à postériorité. Dans les Etats européens, c’est par l’établissement de normes que cette protection est assurée. Le principe de précaution n’est pas reconnu aux USA. Il y a donc une très grande différence. Aux USA, tant qu’il n’est pas prouvé scientifiquement qu’un produit ou qu’un procédé est nocif, il est libre d’accès. En Europe, tant qu’on n’a pas prouvé que le produit ou le procédé est sain, il est interdit d’accès. En Europe, des normes en matière d’alimentation et de santé, ainsi qu’en matière phytosanitaire (santé des plantes) protègent les gens, sans doute de manière encore insuffisante, mais elles existent. Le texte nous dit que c’est l’accord SPS de l’OMC et l’accord vétérinaire bilatéral USA-UE qui vont servir de base pour aller plus loin. Mais dans quel sens ? On peut douter que ce soit vers plus de protection, car les entreprises américaines contestent le bien fondé scientifique des normes sanitaires en vigueur en Europe et poussent le gouvernement US pour obtenir leur abrogation à travers cet Accor. On sat que le refus des OGM, celui du bœuf traité aux hormones de croissance, des poulets chlorés, des carcasses traitées à l’acide lactique, des porcs traités à la ractopamine(additif chimique qui rend la viande plus maigre, interdit dans 150 pays sauf aux USA) sont considérés aux USA comme des barrières protectionnistes dépourvues de pertinence scientifique. On peut douter que les négociateurs américains accepteront le « droit pour les Parties à évaluer et gérer les risques en conformité avec le niveau de protection que chaque Partie juge approprié, en particulier lorsque les preuves scientifiques sont insuffisantes » demandé par le mandat qu’ont reçu les négociateurs européens. D’autant que l’article 45 prévoit que les firmes privées auront le droit de contester toutes les normes (sociales, sanitaires,   environnementales..) devant un mécanisme de règlement des différends.

 

Suite article 25

-         Réglementations techniques, normes et procédures d’évaluation de la conformité.
S’appuyant sur les engagements pris par les parties en vertu de l’Accord de l’OMC sur les Obstacles Techniques au Commerce (OTC), les Parties instaureront également des dispositions afin de renforcer et compléter ces engagements, en vue de faciliter l’accès à leurs marchés respectifs, et d’établir un mécanisme pour l’amélioration du dialogue et de la coopération en ce qui concerne les problèmes bilatéraux d’OTC. L’objectif de ces dispositions serait de donner une ouverture, une transparence et une convergence plus grandes des approches et des exigences réglementaires et des processus d’élaboration des normes connexes, en vue également de l’adoption des normes internationales pertinentes, ainsi que, entre autres, en vue de réduire les essais et les exigences de certification redondants et onéreux, de promouvoir la confiance dans nos organismes de conformité respectifs, et de renforcer la coopération en matière d’évaluation de la conformité et de normalisation à l ‘échelle globale. Il faudrait également s’intéresser aux dispositions relatives à l’étiquetage et aux moyens d’éviter des informations trompeuses pour les consommateurs.

 

Une nouvelle fois, il s’agit d’aller au-delà de ce qui est prévu par l’accord de l’OMC sur les obstacles techniques au commerce. Il faut garder à l’esprit ce qui est considéré par les firmes privées comme obstacles techniques au commerce (OTC), ce sont souvent des exigences destinées soit à informer le consommateur et l’usager, soit à protéger leur santé ou leur sécurité, et un alignement sur les normes américaines ne représentera pas un progrès pour ces consommateurs ou usagers. Il y a lieu de résister à la pression en faveur d’une subordination aux impératifs économiques des règles destinées à vérifier qu’un produit n’est pas nocif et dangereux. Chaque Etat doit pouvoir soumettre l’homologation d’un produit, quel qu’il soit, à des tests. La volonté de soumettre l’homologation à des exigences de conformité normalisées au niveau transatlantique ou international ne peut en rien altérer la rigueur des procédures d’homologation et de conformité. C’est pourtant la menace que fait peser cette disposition, menace confirmée par une note de la Commission européenne qui indique les « les exigences de marquage doivent être limitées à ce qui est essentiel et ce qui est le moins restrictif pour le commerce ».

 

Suite de l’article 25

-         Cohérence de la réglementation

L’Accord comprendra des disciplines transversales sur la cohérence réglementaire et la transparence pour le développement et la mise en œuvre de l’efficacité, du coût-efficacité, et d’une plus grande compatibilité des réglementations sur les biens et les services, y compris les consultations préalables sur les réglementations importantes sur l’usage d’études d’impacts, sur les évaluations, sur l’examen périodique des mesures réglementaires existantes, et sur l’application des bonnes pratiques réglementaires.

 

Par discipline transversales, il faut entendre les listes de réglementations jugées, dans les domaines énumérés, comme non fondées sur des critères objectifs et transparents et comme plus rigoureuses que nécessaires.

 

-         Les dispositions sectorielles

L’Accord comprendra des dispositions en annexe contenant des engagements visant à promouvoir progressivement la compatibilité de la réglementation dans les secteurs convenus d’un commun accord des biens et des services, avec l’objectif de réduire les coûts découlant des différences de réglementation dans les secteurs spécifiques, y compris, le cas échéant, l’examen des approches relatives à l’harmonisation réglementaire, l’équivalence ou la reconnaissance mutuelle. Cela devrait inclure des dispositions spécifiques, de fond et de procédures, dans des secteurs d’une importance considérable pour l’économie transatlantique, y compris, mais d’une manière non limitative, l’automobile, les produits chimiques, les produits pharmaceutiques et autres industries de la santé, l’information et la communication et les services financiers afin d’éliminer les obstacles non tarifaires existants, d’empêche l’adoption de nouvelles barrières non tarifaires et de permettre l’accès au marché à un niveau supérieur à celui fourni par les règles horizontales de l’Accord. En ce qui concerne les services financiers, les négociations devraient également viser à des cadres communs pour une coopération prudente.

 

Comme on le dit vulgairement ; c’est du lourd !

En effet, l’ambition de cet article est de pouvoir s’attaquer aux législations et réglementations existantes dans les secteurs nommément désignés : l’automobile, les produits chimiques, les produits pharmaceutiques et autres industries de la santé (sic !), l’information et la communication et les services financiers.
Pour conclure, tout lecteur ce qui précède peut se rendre compte que cet article 25 constitue bien le moyen de permettre le démantèlement progressif de l’appareil législatif et réglementaire des chacun des 28 Etats membres, chaque fois qu’une norme en vigueur sera considérée par les firmes comme un obstacle excessif à la libre concurrence et, en tout état de cause, plus contraignante pour le secteur privé que ce qui existe aux USA.

 

26 L’Accord comprendra également un cadre de travail pour identifier les opportunités et pour guider la poursuite des travaux sur les questions de réglementation, en y incluant des dispositions qui créent une base institutionnelle pour exploiter le résultat des discussions réglementaires ultérieurs dans le cadre de l’Accord global.

 

Ici n va encore plus fort contre la démocratie.

Ce cadre est la structure institutionnelle prévue à l’article 43. Il s’agit de permettre la poursuite du démantèlement des réglementations, dans un cadre qui ne sera plus soumis à la ratification par les Etats des décisions prises en son sein. C’est l’objectif des articles 26 et 43.

 

27 L’Accord sera obligatoire pour toutes les institutions ayant un pouvoir de régulation et les autres autorités compétentes des deux Parties.

Une nouvelle fois, il est souligné que l’Accord s’appliquera à toute institution en capacité d’édicter des règles, de l’Etat à la commune en passant par les syndicats que ces collectivités peuvent créer.